ÉDITO
Style : Part de l'expression qui est laissée à la liberté de chacun, n'est pas directement imposée par les normes, les règles de l'usage, de la langue.
Je suis enfant de la surprise ; toujours, je la chevauche, elle m’emporte dans les nuages d’albâtre comme Pégase, immaculé bien que né du sang de la Gorgone, tout à la fois divine et fatale surprise.
Les pities des tendances rêvent par une nuit sans lune de me pétrifier dans leurs cahiers ; des historiographes et archéologues arpenteurs de hasard me poursuivent sans répit pour me classer, me ranger, m’archiver, me morceler, m’écarteler s’il le faut, me livrer pieds et poings liés à un industrieux marchand au fin fond d’une vallée du Xinjiang.
Las ! le style point ne se copie.
Il n’y a que Pierre Yovanovitch qui puisse faire du Pierre Yovanovitch, déposant avec délicatesse des touches de mobilier colorées, sensuelles, comme un pastelliste du 18ème siècle.
Il n’y a, sous les tropiques, d’océans en tempêtes , que Reda Amalou qui sache tel un alchimiste comment « on fabrique l’ordre à partir de l’énergie du chaos ».
Il n’y a que Sarah Lavoine pour faire entrer un rayon de soleil marocain, un bout de ciel bleu arraché à la Méditerranée, dans un salon haussmannien, comme s’ils y étaient nés de toute éternité.
Ainsi, je sors de ma chrysalide, comme une ville, une Babel aux multiples talents, dont les ruelles tortueuses et inattendues se déterminent par les interstices laissés entre les constructions disparates, pour finalement former une cité douée d’une âme unique, ainsi, de pluribus unum, je m’assemble et se dessine un style français.
Seul un seigneur pouvait me deviner : « Qu'est-ce que l'art sinon ce par quoi les formes deviennent style ». Godard.
Jean-Paul BATH